Sujet: L'arrivée de Jarvis ...
Bonjour à tous,
Au nouveau venu que je suis de se présenter, décliner, expliquer, palabrer, parlementer.
Bien. Commençons.
Je découvrais Hermann il y a de cela quelques années, avec Lune de guerre …
Un ami qui me plaçait l'album entre les mains. C'était parfait.
Et puis le temps passa, les années filèrent en étoiles, et d'autres lectures vinrent à moi ...
Tout cela jusqu'à ce qu'un autre ami, fidèle lecteur de Bernard Prince à l'époque de sa parution dans le journal de Tintin, me fit découvrir l'existence d'un nouvel opus. Un album qui venait tout juste de sortir ... Une menace fluviale que je découvris, curieux.
Ce fut là ma véritable première rencontre avec l’œuvre d'Hermann.
Parce que l'épisode est bon. Oui.
Depuis, je découvre, et découvre encore.
Comanche, Prince, Jeremiah, Bois-maury et les one-shots ... la route est longue, passionnante parce que passionnée.
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Permettez que je prenne quelques lignes pour évoquer un aspect de ma découverte hermanienne :
Le grand, haletant, magnifique, duel Bernardo-comanchin ! ou Comancho-Princier !
... Entre Comanche et Bernard Prince, je choisis sans hésiter Bernard.
Je crois avoir lu dans les pages de forum qu'Hermann préférait Comanche, mais je m'en fiche.
Il est certain que le diptyque de Laramie est étonnant... la mort de Dobbs, le combat de Red Dust ...
mais la petite môme Comanche est plus qu'agaçante, et jamais - non, jamais - le vieux Ten-Gallons n'aura la classe émérite de Barnaby “Barney” Jordan !
(mais j'avoue honnêtement : Red Dust, lui, peut prétendre arriver à la cheville de Bernard Louis Joseph Fulgence Prince ! - mais de toute façon, la coiffe blanche de Bernard est davantage exceptionnelle que le cheveux rouge de Dust, rien n'y fait.)
Certes, il y a des coups d'éclats dans la série Comanche.
L'attaque de la cabane du trappeur dans Les loups du Wyoming ! ... mais le rythme du récit n'est pas parvenu à m'accaparer tout au long de l'album, au contraire de plusieurs épisodes du trio du Cormoran ... J'ai été pris alors, littéralement, page après page, du début jusqu'à la fin, par La fournaise des damnés, Le souffle de Moloch ou Le port des fous, ... tous menés de main de maître !
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J'ai grandi, aidé en cela par plusieurs héros dessinés.
G. Lagaffe côtoyait Johan et Pirlouit, et d'autres personnages encore.
Ils m'ont influencé, aidé à devenir (à peu près) intelligent.
(Gaston Lagaffe est la série la plus intelligente que je connaisse.)
... Et relisez le Pays Maudit de Peyo !
Qu'est-ce donc ? sinon deux compagnons (et un roi) qui n'hésitent pas à franchir un marécage, un désert et une montagne pour s'en aller délivrer le peuple Schtroumpf d'un ennemi dont il ne savent rien, absolument rien, sauf qu'il est un schtroumpf qui schtroumpfe du schtroumpf ... Si cela n'est pas un exemple fabuleux de courage fou, arbitre libre, pour le gamin que j'ai été !
Avec Bernard Prince, j'ai retrouvé cela.
Ne parlons pas de modèle, Bernard Prince est juste un homme libre, obéissant à ses règles propres, et avançant tant bien que mal. Il ne donne pas de leçon. Ça me plaît furieusement. Idéalement, il faudrait toujours vivre à la manière de gars comme lui.
Voilà pourquoi je vote, si vote il y a, pour un nouvel opus du héros Bernard !
C'était ma minute - confuse certainement et je m'en excuse - de folie Princière.
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L'autre aspect de l’œuvre d'Hermann que j'apprécie, c'est sa galerie de portraits, sages ou déchirés, salauds ou gentils, tous sublimés.
Puis je relève encore la présence de Mère Nature. Calme ou déchaînée, mais toujours grandiose, ahurissante. Du caillou rouge à l'arbre vert, en passant par les quatre éléments ... Hermann saura nous plonger dans l'océan le plus sombre, dans le désert le plus rude. C'est réellement impressionnant. Ça calme, en même temps que cela transporte, exalte, durement.
C'est le mot : je retrouve aujourd'hui avec Hermann une exaltation semblable à celle que j'ai vécu il y a quelques années en découvrant le dessin de Jijé ! ... Un souffle puissant. Parce que derrière le travail donné à voir, à lire, il y a quelqu'un de vrai. Dès lors, on accepte de plonger, sans comprendre, dans l'histoire.
Avant de prendre la parole aujourd'hui, j'ai parcouru ce forum bien ficelé. J'ai pu écouter Hermann et d'autres acteurs de l'aventure ...
J'ai pu découvrir, approcher, apprécier un peu de la mentalité hermannienne.
Elle me plaît.
Je peux le dire maintenant, j'ai 25 ans à peine, et débute dans la bande dessinée ... que je pratique pourtant depuis l'enfance. Et lorsque qu'Hermann déclare dans ce forum même :
- « La bande dessinée ? Une passion ? C’est sans doute excessif. Je dirais que c’est un besoin, le besoin de « faire » quelque chose en racontant des histoires. Non, un loisir, certainement pas : je suis incapable de dessiner de manière relax, détendue. Non. C’est chaque fois une colline à grimper. Il y a peu de place pour le plaisir. Il m’est déjà arrivé, épisodiquement, de ressentir de l’excitation à l’idée de me lancer dans la réalisation d’un dessin ou d’une planche. Mais je n’appellerais pas ça du plaisir. »
… Je peux vous assurer que je ne suis pas loin de ressentir les choses de la même manière, vraiment.
Je me rappellerais toujours la phrase de Jijé :
- « Des jeunes dessinateurs viennent me voir avec quelques dessins … ils reviennent un an plus tard, ils n'ont fait que deux nouveaux dessins ! Je leur dis : « mais comment voulez-vous y arriver ? Il faut remplir cette pièce de papier ! C'est bien cela la bande dessinée : moins parler et plus travailler. »
… J'aime. J'ai l'impression qu'Hermann n'a pas perdu de temps à parler. Il n'est pas là à s'agiter, s'exhiber béat. Du moins est-ce bien l'impression forte qu'il laisse.
Il a dessiné, il dessine.
Peut-être son dessin parle-t-il pour lui.
- « Devant un album d'Hermann, même les hommes les plus imbéciles finissent par se taire. » diraient Ventura et ses compagnons.
Le silence est d'Hermann.
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J'étais hier au festival BD d'Illzach, dont l'un des forumeurs a présenté quelques photographies.
Hermann y était, y est peut-être encore, mais je n'ai pas pu approcher, tant pis, je ne vais pas pleurer.
J'ai profité de l'occasion pour dévaliser les vendeurs, repartir avec une suite princière (L'oasis en flammes et d'autres épisodes), ainsi qu'avec, sous le bras, un album d'exception : Caatinga.
J'ai lu tout cela hier soir, j'en reste abasourdi.
La musique d'Ennio Morricone n'était plus très loin, ni le sourire blanc de James Coburn.
Mais non, puisque le silence est d'Hermann.
Avant tout, la roche cassée, calcinée et lourde du Sertao m'a rappelé les déserts rouges et immenses de Fortune Carrée, le roman génial de Joseph Kessel, l'un de mes écrivains favoris, génie de l'écriture, grand traceur de portraits humains denses et vivants.
...
Voilà.
J'ai beaucoup écrit et en même temps rien dit. C'était désordonné.
D'habitude, je parle peu (il faut retenir la leçon de Jijé), mais là, je devais ne pas faillir à mon devoir de présentation.
Que Hermann Huppen sache que son dessin foudroie, intemporel en diable !
Et que son honnêteté, son énergie, sont appréciées, encore, par les jeunes imbéciles que nous sommes.